The Great China Tour : Chap 18: Destination Mandchourie !
Le temps vient de nous séparer Soshi et moi. Il part en Mongolie et moi en Mandchourie. Le thermomètre de mon téléphone indique -24°C à Harbin en Mandchourie et…. -34°C à Oulan-Bator en Mongolie. Avant ça, ultime séance shopping pour nous préparer au grand froid qui nous attend. Je ne sais pas comment il va survivre en débarquant de Singapour jusqu’à la Sibérie. Ce type est fou. Ou alors, génial. Je crois que je l’envie. Son voyage le mènera de Pékin jusqu’à la Mongolie, de Mongolie jusqu’à Moscou en prenant le mythique transsibérien, et de Moscou jusqu’à ma vieille Europe. Il passera en Hongrie, puis en Bulgarie, où un ami à lui l’attend. Je rêve de faire un voyage aussi fou, un jour ! Même si je n’ai pas à me plaindre !
On passe au H&M de Pékin. J’achète des gants et un bonnet. Il prend ce qu’il y’a de plus chaud. Je fais naïvement confiance à un vendeur de fringue suédois pour me protéger contre le froid. Soshi me fait passer par Uniqlo, pour me faire prendre des genres de collants thermiques unisexes. Je me demande s’il n’a pas des actions dans le magasin ou s’il fait une crise de nationalisme en me faisant acheter japonais. Bah ! A -24°C, je ne cracherais surement pas sur une couche de vêtements supplémentaire.
Bye Bye Beijing!
Je prends le train à la gare du nord. Toujours le même modèle de train. Toujours le même rituel. Cette fois, je me suis renseigné, puisqu’ils parlaient anglais à la gare. J’arrive tôt dans la matiné, genre 9h30. Au moins, ce n’est pas 6h comme d’hab.
La Mandchourie, et sa capitale, Harbin, c’est pas vraiment un endroit que le club med recommande. En fait, l’endroit est plus célèbre pour sa puissante industrie lourde, genre fabrication de machines industrielle, et la pollution massive au benzène de la rivière Songhua en 2005. Ce n’est pas tout ! On dit de Harbin que c’est la capitale du froid ou encore la ville de glace ! J’en avais aussi entendu parlé comme étant le siège de l’Unité 731 de l’Armée Impériale Japonaise durant la seconde guerre mondiale, unité de recherche sur la guerre bactériologique, qui menait plus ou moins les meme recherche de le Docteur Mengele sur les prisonniers de guerre et les civils chinois. Charmant, non ? Envie de partir ? Moi oui !
La Gare du Nord de Beijing.
Pourquoi ? Parce que Harbin est également surnommé le Paris d’Orient, ou même le Moscou d’Orient, parce que Harbin est en fait une ville historiquement russe, le suédois de Xi’an m’en a parlé, ça à l’air plutôt sympa, et surtout parce que c’est en janvier que débute le Festival de Sculpture sur Glace, renommé internationalement. C’est maigre comme raison ? Bon alors, c’est aussi parce que l’idée de sortir un peu des sentiers battus en Chine me branchait. De plus, la Mandchourie est historiquement un carrefour de culture entre le monde chinois, coréen et bien sur russe. D’où toute sorte d’interactions improbables. C’est plus sympa, envisagé comme ça, non ? Il ne m’en fallait pas plus pour me décider à suivre les traces de Corto Maltese en Mandchourie ! A ma connaissance, c’est la seule personne, réelle ou fictive, à s’être aventuré là bas ! (A part le suédois de Xi’an.)
Le train. Une fois de plus. Couchette dure, encore. Mes compagnons de voyage ne parlent pas un mot d’anglais, pour changer. Cette fois, c’est une espèce de grosse pouffiasse avec un coté poissonnière assez poussé. Ses deux gosses ne font que de pleurer, et ils se regardent un film en chinois avec le volume à fond. Je sens que ce voyage va être cool…
Je regarde la métropole pékinoise défiler par la fenetre. Je quitte l’ancien et le futur centre du monde. Sacré expérience. On quitte le centre riche pour passez dans des banlieues sombres et glauques, surtout dans la nuit qui commence à tomber. Les feux d’artifices et les pétards, plutôt rare en journée, se déchainent à nouveaux. Rien à voir en terme d’intensité avec l’autre jour, mais quand même. On roule à travers la campagne, et chaque village ou petite ville traversée s’illumine de milles feux. Il y’a un coté féérique à tout ça.
Je me mets mes écouteurs sur les oreilles et je me plonge dans la lecture de “Guerre et Paix“ de Tolstoï sur mon smartphone. Idéal pour l'immersion.
Réveil. Il est encore tôt. Mes chers compagnons de compartiment dorment encore. Je me demande à quoi ressemble la Mandchourie. Le voyage est extrêmement long. Je suis parti en tout fin d’après-midi la veille. Je quitte ma couchette et m’installe près de la fenêtre. La province du Heilongjiang est plate, désolé, composé de prés arides et de quelques arbres. Pas de neige, contre tout attente. Mais les fleuves sont gelés. On traverse de petits villages de maisons sans étages construites en briques rouges. Certains possèdent des routes goudronnées, d’autres non. Les gens ont l’air habillés chaudement. On arrive dans une zone plus urbanisée. Harbin. Capitale de la Sibérie Chinoise. De grandes barres d’immeubles, allant du vétuste à l’ultramoderne, des mines de charbon, des usines pétrochimiques. J’ai l’impression de m’être trompé d’endroit. On arrive à la gare. Une fois à l’extérieur, un froid intense, mordant et incroyablement pénétrant me saisit. Je n’ai jamais eu ça ! La gare n’est visiblement pas dans le centre historique. Mais je cherche surtout un endroit ou me protéger du froid et ou prendre un café brulant ! KFC, comme d’hab. C’est malheureux à dire, mais cet empoisonneur de colonel m’a rendu bien des services. -24°C, le choc. Il ne faisait que -8°C à Pékin. Enfin “que“, façon de parler.
Harbin, ou Haer’bin pour les chinois est situé à quelque centaines de kilomètres de la frontière russe. De l’occident quoi. Ce cher occident qui commence à me manquer sérieusement. A l’époque où les puissances occidentales se partageait des parts de l’immense gâteaux qu’était la Chine des Empereurs Qing, d’origine Mandchoue au passages, les Empereurs Russes cherchaient à relier leur ville nouvelle de Vladivostok au reste de la Russie, ce qui était techniquement compliqué en restant sur le territoire russe. La seule option valable était alors de traverser le territoire chinois. C’est dans cette optique qu’en 1898, la Société des Chemin de Fer de l’Est Chinois installa son quartier général dans une petite bourgade chinoise, rebaptisé Kharbin, puis Harbin, qui grossi en importance sous l’effet du développement économique induit par l’immigration russe. La compagnie commença à desservir plusieurs villes russes et chinoises de la région. Il est compliqué de dire à qui appartenait Harbin à cette époque, puisque la région appartenait légalement à la Chine, mais les Russes y faisaient la loi de facto, sans pour autant en réclamer la souveraineté. Toujours est il que cette situation ambiguë ne dura pas, vu qu’en 1905, l’influence russe diminua grandement suite à la défaite des Tsars lors de la bataille de Port Arthur, toute proche. Avec le départ des russes, une cohorte d’occidentaux s’installa à Harbin initiant un processus de développement économique auquel les chinois prirent une part importante. Base arrière des Russes Blancs durant la Guerre Civile Russe, elle devint l’un de leurs refuges après leur défaite, participant un peu plus à la russification de la ville. Les japonais prirent la ville en 1932, en même temps que le reste de la Mandchourie. Les russes prirent la ville en 1945, pour la restituer aux autorités chinoises de Tchang Kaï Check, qui perdirent la ville au profit des troupes de Mao Zedong au bout de quelques mois. A cause des relations tendues entre Mao et Staline, les quelques Russes restant furent reconduit manu militari en Union Soviétique.